Arbres – Feuilles
– Humus – Charbon – Charbon de bois.
Il faut des
siècles pour écrire un A. Il faut des siècles aussi pour l’articuler. J’ai mis
48 ans à faire celui-ci.
L’Afrique change à
vitesse grand V mais on reste toujours avec les mêmes clichés.
Le premier
partage serait d ‘apprendre à les concasser puis à les faire disparaître.
Ce qui émerge est fait de blocs de ciment ou les seuls animaux qui paissent
sont des enceintes qui expriment des lignes de basses à faire sauter n’importe
quel tympan.
Les pieds au sol,
avec des sandales pour ne pas laisser de marques sur le sable. Passer
régulièrement un petit coup de balayette comme les indiens après un coup
d’éclat.
« Petit
petit petit », bis repetita. A la queue-leu-leu, il faut encore attendre.
Et l’avion comme une mère poule nous appelle ; « Petit petit
petit ».
Fixer les roues,
penser à des soleils bleus ou bien à autre chose.
À Gougou par exemple. Aves son grand couteau, elle
doit encore être sous le manguier du jardin en train de découper quelques pattes
de poulets.
On ne voyage pas en bus, on s’ennuie avec en plus la sale sensation qu’on est tous installés dans une bétaillère en route pour l’abattage. Je me souviens encore de la tête du salaud qui venait chez nous chercher les cochons qui partaient à l’abattoir. Il n’avait pas la main molle, ça on peut dire. Un sadique qui les faisait hurler et meurtrissait leur chair, ça virait au bleu violacé rien qu’avec un seul coup de fouet.
Bus, shuttle,
van, chapa, toca-toca, peut importe. Ça roule et il n’y aura jamais d’espace
pour allonger le bras.
Les escaliers
devraient tous monter au ciel, directement. De temps en temps, quelqu’un se
perdrait, irait voir Saint-Pierre ou se ferait devorer par un Ogre. Sans doute
quelqu’un se casserait le bout du nez.
Part méchant bus,
et ne revient pas.
Part méchant
escalier et ne revient pas.
Laissez moi songer
à ce que les filles préparent pour cet après-midi. C’est ça les
filles, elles passent des heures a tourner autour des marmites, un couteau dans
la main, une cuillère a bois dans l’autre. Mais, le fond de leur affaire c’est
le papotage. Elles passent des vies entières a la moulinette et si je n’étais
pas si prêt de leur langue, bien pendue comme il se doit, moi aussi je ferais
les frais de tant d’énergie. Pour l’instant, elle me laisse mijoter.
Mijoter. J’aime
bien être mijoté. J’aime les mijoteuses. Une sorte de cajoleuses.
Échauffement des ailes avant le grand saut dans
l’infini cosmos.
D’un coup de fétu de paille on s’en va. Un délice.
Prend son envol,
rattrape l’escalier et le bus.
Ephémère vol. N’être
ni au début ni à la fin, en transit simplement.
Avec la chance de
compter les palmiers, l’ombre des palmiers, la trace ancienne des palmiers.
Odeur de charbon
de bois. Feux de brousses. Nuit feux. Dans sa maison, une femme chauffe de
l’eau pour laver ses petits et se faire un thé.
Odeur de souffre.
Il suffirait d’une pichenette de rien du tout pout cogner un caillou.
Odeur de répit.
Le vol continue.
Et je me dis que
vraiment j’aurais plaisir à manger quelques patates frites ! Même si elles
ne sont pas trop cuites…
Toutes deux étaient
venues du Swaziland. La grand-mère et la tante, pas intéressées du tout par
cette histoire d’avion. Couteau en main, la grand-mère a arraché
toutes les mauvaises herbes du jardin. La tante m’a seulement dit que je ne
pouvais pas lui parler, que si je lui parlais, je deviendrais fou. J’ai bien
compris.
Il fait chaud et
sec. Deux maisons de sel font face à une dune caramélisée. Un dimanche au-dessus du Sahara.
Du fond de mes
poches, je sors un petit sac remplit de « Puxinhas » de toutes les
couleurs et saupoudre le paysage pour la plus grande joie des mômes qui se blottissent
à l’ombre des palmiers.
Être un papa-avion et fuser à la
vitesse d’un neutron n’ importe où.
Je n’ai mis qu’une
minute pour faire ce A ci.
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